Le
13 juin 1846, alors que la révolution industrielle bat son plein à
l'est du Nord-Pas-de-Calais, Eugène Soyez entreprend des recherches
dans le hameau de l'Escarpelle près de Douai dans le but de déterminer
si le gisement houiller se prolonge au-delà de la concession des Mines
d'Aniche. Pour réaliser ces travaux, Soyez s'associe avec plusieurs
propriétaires de Cambrai et fonde en 1847 la Compagnie charbonnière de
la Scarpe. Ces différents sondages étant couronnés de
succès, Soyez effectue une demande de concession dès 1847 avant de
créer la Compagnie
des Mines de l'Escarpelle.
Le fonçage du premier puits débute la même année mais ce n'est qu'en
1850 que la première berline de charbon remonte à la surface. Les
veines découvertes sont hélas irrégulières et produisent un charbon de
qualité extrêmement médiocre. Ces déboires pousseront rapidement la
société à réaliser de nouveaux travaux de recherche qui mèneront, en
1850, à la création d'un second siège à Leforest. Le charbon est cette
fois de meilleure qualité mais les terrains demeurent accidentés, ce
qui poussera l'Escarpelle à réaliser une troisième vague de sondages
qui déboucheront cette fois sur la découverte de belles et riches
veines de houilles grasses. Un troisième siège sera dès lors construit,
la production de la société passant de 57.000 tonnes de charbon en 1860
à plus de 132.000 tonnes en 1863.
Le succès de la fosse N°3
motive rapidement la société à entamer la construction d'un quatrième
siège mais la nature aquifère du terrain ralentit considérablement
l'avancée des travaux qui ne se terminent qu'en 1872, après six ans
d'effort. Un cinquième siège entrera en exploitation en 1880 mais,
après de nouveaux sondages réalisés à Auby, la Compagnie de
l'Escarpelle se retrouve dans une situation financière plutôt délicate
qui poussera ses administrateurs à se rapprocher de la Compagnie des
Mines d'Aniche. Des pourparlers sont entrepris entre les deux sociétés
sans jamais aboutir et, alors que tout semble perdu, de nouveaux
investisseurs permettent à l'Escarpelle de doubler son capital. Ce
sauvetage inespéré permet à la société d'acquérir en 1880 la concession
de Courcelles-lez-Lens et de moderniser ses installations.
À
la fin du 19ème siècle, la société est parvenue à se redresser
économiquement et possède désormais sept sièges ainsi que diverses
installations dont voici la liste :
- fosse 1 - Eugène Soyez,
- fosse 2 - Douai,
- fosse 3,
- fosse 4 / 4bis,
- fosse 5,
- fosse 6,
- fosse 7,
- une presse à briquette,
- des fours à coke,
- une sous-station électrique,
- trois lavoirs.
Les
puits 7bis et 8 seront fonçés entre 1902 et 1906, bientôt suivis par la
construction de la fosse N°9. Située à Roost-Warendin, cette dernière
entre en exploitation la même année mais la première guerre mondiale
détruit ses installations de surface ainsi qu'une grande partie des
autres sièges de l'Escarpelle. Après l'armistice, ces derniers furent
reconstruits et modernisés avant d'être équipés d'une nouvelle batterie
de fours à coke, d'une usine à boulets ainsi que d'un nouveau lavoir
central. 3.200 ouvriers travaillent pour la société qui produit
désormais 821.650 tonnes de charbon par an ainsi que 120.000 tonnes de
coke. En 1923, l'Escarpelle construira son dixième et dernier siège à
Leforest. En 1946, les mines françaises sont nationalisées et
l'Escarpelle intègre le Groupe
de Douai, une nouvelle structure composée comme ceci :
- la Compagnie des Mines de l'Escarpelle,
- la Compagnie des Mines d'Aniche,
- la Compagnie des Mines d'Azincourt.
En
1955, la fosse N°9 devient un siège de concentration et un nouveau
triage-lavoir est construit sur son siège. Ce dernier ferme cependant
ses portes en 1968, le charbon extrait étant dèsormais traité dans le
lavoir du siège Barrois, le site le plus moderne de la Compagnie des
Mines d'Aniche. La réorganisation de la société entraîne dès les années
50 la fermeture des fosses 1 et 4 / 4bis, bientôt suivies par les
sièges 7 / 7bis et 8 qui fermeront tous deux durant la décennie
suivante. Par la suite, le programme de récession national oblige la
société à ralentir son taux d'extraction et au début des années 70, les
fosses 2 et 3 sont également mises à l'arrêt. Dans les années 70, le
chevalement du puits N°9 est remplacé par le portique qui se trouvait
sur le puits N°13 de la Compagnie des Mines de Nœux. Le puits N°5, ne
servant plus qu'à l'aérage depuis la nationalisation, fut abandonné à
la même époque et c'est finalement le 26 octobre 1990 que la dernière
berline remonte au jour via le puits N°9 qui sera l'avant dernier siège
à fermer ses portes dans le bassin. Par la suite, la grande majorité
des installations furent détruites à l'exception de la machine
d'extraction de la fosse 6 qui se trouve actuellement dans la grande
verrière du Centre Historique Minier de Lewarde ainsi que du
chevalement du siège N°9 qui est toujours debout au milieu d'une zone
industrielle.
Reportage sur le siège N°9 de la Compagnie des Mines de
l'Escarpelle ainsi que sur ses bornes de puits.
Copyright (c) / Photos by Nicolas
Elias, Xavier Fer & Laura Dambremont