Au
18ème siècle, de nombreuses petites exploitations parsèment l'est du
bassin mais c'est en 1725 que l'histoire minière boraine va prendre
l'un de ses tournants les plus décisifs. En 1725, plusieurs maîtres de
fosses s'associent en vue d'exploiter des couches de charbon nommées
"Produits" sur le territoire de Jemappes. Plusieurs puits sont fonçés
mais suite à de nombreuses venues d'eau, il est décidé de faire appel à
Ambroise Richébé, un riche marchand lillois, pour financer une machine
à feu en échange d'une partie de la production. Richébé acquiert
également 24 actions des maîtres des Produits avant d'obtenir un bail
annuel pour extraire la houille des veines des Produits sous la commune
de Quaregnon. Délivré par le chapitre de Ste Waudru, ce bail fut
renouvelé jusqu'en 1777, année où les chanoinesses remirent ce même
accord entre les mains du sieur Hotois et consorts. Cependant, après un
recours en sa faveur, Richébé récupère ses droits d'exploitation et
c'est finalement aux maîtres de la Cossette à Balle que reviennent une
majeure partie des veines des Produits sous Quaregnon. En manque de
capitaux, Richébé se tourne alors vers des investisseurs français et
c'est en 1785, suite à un nouveau contrat d'association, que viendra au
monde la Société
Civile des Produits.
Après la mort de Richébé, le 1er avril 1788, le borinage connaît une
période politique troublée plongeant la société dans une longue période
d'inactivité qui ne prit fin qu'après le rattachement de nos régions à
la France.
Après la reprise des activités, la société passe de
24 à 96 actions avant d'être délaissée par les investisseurs français
au profit d'industriels fortement impliqués dans les charbonnages
borains et carolorégiens comme le Gouffre ou Monceau-Fontaine.
On retrouve ainsi parmi le conseil:
- la famille d'Arenberg,
- la famille de Mérode-Westerloo,
- le comte de Gavre,
- le sieur Corbisier,
- le sieur Taintenier,
- le sieur Gendebien.
Ce
dernier deviendra par la suite le principal décisionnaire de la société
avant l'arrivée de la famille Colenbuen, au début du 19ème siècle.
Également
actifs dans le secteur industriel, les Colenbuen détiennent des actions
dans le bassin depuis 1766. Petit à petit, ces derniers rachèteront les
actions de la société avant d'investir massivement dans la
modernisation des installations. Réalisés durant une longue période de
crise, ces travaux mirent la société au bord de la faillite et c'est
suite à l'apport de plusieurs institutions financières que nait, en
1835, la Société
Anonyme du Charbonnage des Produits.
Dirigée désormais par les Colenbuen et par la Société Générale, le
charbonnage des Produits devient l'un des principaux centres extractifs
du bassin. Entre 1865 et 1870, la société fait l'acquisition de la
concession de Nimy ainsi que la partie jemappienne de la concession
d'Ostennes, appartenant auparavant à la Société Anonyme du Couchant de
Flénu. Le 14 février 1922, elle réalisera l'une de ses plus importantes
modification avec la fusion de la Société Anonyme du Charbonnage du
Nord du Rieu du Coeur, une société née en 1898 de la scission de la
concession du Rieu du Coeur et de la Boule Réunis. Son unique siège,
situé à l'ouest de la concession deviendra rapidement l'un des sites de
production les plus importants de la société. La société des Produits
continua ses extensions en septembre 1927 avec l'acquisition d'une
partie des couches de l'ancienne concession révoquée de Belle et Bonne,
une zone exploitée à l'origine par trois remises successives effectuées
par Ambroise Richébé et François Piérache à un groupe de houilleurs
constitués en société en septembre 1787 et dont le siège unique connu
une histoire assez mouvementée faite de conflits internes et de
constitutions de sociétés diverses dont aucune n'aboutit réellement
comme la Société Anonyme la Mine aux Mineurs ou la Société Anonyme du
Charbonnage de Flénu Central. Un an plus tard, la société fusionne avec
la Société Anonyme des Charbonnages du Nord de Flénu, alors en
liquidation, et met ainsi la main sur les installations du charbonnage
de Ghlin. Après
ces différentes acquisitions, un arrêté royal autorise les Produits à
fusionner entre elles les différentes concessions minières donnant
ainsi naissance à une zone d'exploitation de 4.069 hectares : la
concession des produits et de Ghlin.
Au sud de Jemappes, une autre société prend une importance considérable
: la Société
Anonyme des Charbonnages du Levant de Flénu.
Cette société, née sous le nom de Société Anonyme des
Charbonnages du Levant
en 1835, possède à l'époque un capital de 2.800.000 francs et est
constituée de l'apport des biens de la Société Charbonnière de
Cache-Après, Ostennes et Crachet Réunis, une société née sous l'égide
de Nicolas François Piérache et de ses associés en 1788. Bien que la
concession de Cache-Après soit étendue en 1848, les zones
d'exploitation de Crachet et d'Ostennes cessent leurs exploitations peu
de temps après et sont revendues à la Société Charbonnière du Couchant
de Flénu en 1835, le Crachet allant par la suite à la société de
Picquery pour devenir la Société Anonyme des Charbonnages de
Crachet-Picquery, société qui sera rachetée en février 1883 par les
Charbonnages du Levant, le Crachet revenant donc pour un temps dans sa
société d'origine. Les résultats n'étant pas satisfaisants, la société
décide d'abandonner définitivement le Crachet-Picquery en faveur de la
Compagnie des Charbonnages Belges.
Après l'acquisition de la concession de Belle-Victoire, en 1843, le
Levant fusionne avec la Société
Anonyme du Haut-Flénu dont la constitution, en 1838, est
la résultante de la fusion de plusieurs petites sociétés dont voici la
liste :
- Sidia-Clayaux,
- Jausquette et Bonnet Roi,
- Machine à feu de l'Horiau,
- Bonnet et Veine à Mouche,
- Machine à feu de l'Auflette,
- Garde de Dieu,
- Grande Sorcière,
- Morette.
En
outre, la Société Anonyme du Haut-Flénu exploite également à forfait
une petite concession du centre de Flénu via la Société Anonyme de
Turlupu mais, après la fusion du Levant et du Haut-Flénu, cette remise
sera cédée à la Société Anonyme du Charbonnage des Produits. Ce nouveau
regroupement donnera dès lors naissance à la Société Anonyme des
Charbonnages du Levant de Flénu.
La crise des années
trente touche
durement le secteur industriel et la Société Générale décide de
centraliser les exploitations qui sont sous son égide. C'est dans ce
contexte que cette dernière décide de fusionner la Société Anonyme du
Charbonnage des Produits avec la Société Anonyme des Charbonnages du
Levant de Flénu et par la même occasion de permettre l'exploitation des
espontes dont on évalue le volume à 1.700.000 tonnes de charbon. La
fusion de ces deux sociétés titanesques, le 7 décembre 1932, donnera
naissance à la Société
Anonyme des Charbonnages du Levant et des
Produits de Flénu, un vaste ensemble industriel dont la
concession
couvre désormais 9.380 hectares, faisant de celle-ci la plus grande
zone d'exploitation minière de Belgique. Cependant, la situation
financière se dégrade encore et en 1939, alors qu'elle subit une perte
de 34 millions de francs belges, la société est mise en liquidation.
Alors que de vives protestations secouent le bassin, la société
reviendra sur le devant de la scène d'une manière totalement
inattendue. En effet, l'invasion de la Pologne par l'Allemagne mena à
un embargo à l'encontre de cette dernière, embargo qui concerne
notamment l'importation de charbon de la Ruhr. La production de la
houille devenant alors une nécessité nationale, la Société Anonyme des
Charbonnages du Levant de Flénu fut remise sur pied par le gouvernement
de l'époque. Après la guerre, la constitution de la
Communauté Européenne du Charbon et de l'Acier entraîne la fermeture de
plusieurs puits secondaires. Cinq sièges restent en activité :
- Le siège N°17 / St Guillaume,
- Le siège N°27 / N°28,
- Le siège N°14 / Ste Zoé,
- Le siège de l'Héribus,
- Le siège
du Nord du Rieu du Coeur.
Entre
1954 et 1956, ce dernier siège subit plusieurs coups de grisou qui
entraînent la mort cumulée de quinze mineurs. Suite à ces incidents, le
siège fermera définitivement ses portes en 1959.
C'est cette même année, les actionnaires de la société décident de
faire l'apport de la
concession et d'une grande partie des actifs à la Société Anonyme des
Charbonnages du Borinage, une nouvelle société créée pour gérer et
liquider les actifs liés à l'industrie houillère dans le Borinage.
Seuls les sièges Héribus et Ste Zoé sont encore en exploitation mais,
le 27 février 1960, ce dernier ferme ses portes avant d'être suivi par
la fermeture précipitée du siège de l'Héribus, le 2 mars 1968, dont le
cuvelage avait subi de lourds dommages suite à un mouvement de terrain.
Aujourd'hui, il reste peu de vestiges de cette immense société mais il
est toujours possible de visiter une partie de l'ancien siège Ste Zoé,
reconverti depuis en centre équestre.