Dans
le but de développer les gisements houillers encore inconnus du Rhin
inférieur, plusieurs sondages furent effectués dans la région de
Rheinberg et c'est en 1897 qu'un de ces sondages, situé près de
Budberg,
met au jour plusieurs filons de charbon ainsi qu'une gigantesque couche
de sel. Cette découverte suscita très vite l'intérêt de la Solvay
Werke AG, une société allemande basée alors à Bernburg.
A partir
de 1899, Solvay réalise 43 puits de recherche dans le but de délimiter
la zone salifère exploitable et en 1908, la superficie du gisement est
fixée à 88km². Dans le but d'exploiter à la fois le charbon et le sel,
il fut décider de construire deux sièges distincts :
- le siège Wallach, destiné à l'exploitation salifère,
- le siège Borth, destiné à l'exploitation houillère.
En
1906, une équipe de planification est créée dans le but de développer
les deux fosses et une usine de traitement de la soude est rapidement
construite à Borth. Le fonçage des deux puits de Borth s'avère
extrêmement compliqué du fait de l'instabilité du terrain, composé
principalement de sable. Ce problème, connu depuis les sondages de
1899, devint rapidement un gigantesque défi et c'est vers la
technique de la congélation des sols que la Solvay Werke AG décida de
se tourner.
Le creusement débute en février 1908 mais, après seulement quelques
jours,
une venue d'eau dans le sol gelé perturbe la stabilité du puits N°1 et
le chantier s'interrompt avant de reprendre de plus belle en avril de
la même année. Le puits atteint une profondeur de 330 mètres en mai
1909. En août 1909, des fissures sont constatées dans le coffrage
du puits N°1 et une sur-congélation est nécessaire pour réparer les
dommages. Le fonçage du puits reprend dès septembre mais de graves
inondations surviennent les semaines suivantes et les puits sont
complètement inondés, il faudra près de dix mois pour assécher et
désensabler les travaux. Le puits N°2 atteindra 375 mètres en décembre
1910 mais une nouvelle catastrophe survint en janvier 1911 avec la
chute d'une charge dans ce puits. Cet incident causa la rupture des
conduites d'eau, ce qui entraîna une nouvelle inondation majeure. Le
pompage reprit mais le coffrage fut tellement abîmé dans l'incident que
de nouvelles venues d'eau et de sable inondèrent à nouveau le puits dès
trente mètres de profondeur. Pour pallier à ce problème, de nouveaux
trous de congélation furent foncés autour du puits sur une profondeur
de 500 mètres, ce qui arrêta net l'arrivée d'eau. Les travaux de
consolidation et d'assèchement s'achèveront en juillet 1911. La
première guerre mondiale ralenti considérablement l'avancée des travaux
mais c'est finalement en 1917 que le dôme de sel est atteint à une
profondeur de 560 mètres.
En 1920, les dirigeants de Solvay
décident d'abandonner l'idée d'extraire à la fois du charbon et du sel.
Les raisons sont multiples, les veines de charbons sont profondes, les
exigences de sécurité sont trop importantes et les coûts d'une double
exploitation seraient beaucoup trop conséquents. Solvay décide donc de
se concentrer sur l'extraction du sel gemme et poursuit ses travaux sur
le siège de Wallach qui remonte ses premières berlines en 1923.
Cependant, ce petit siège ne fut jamais mis complètement en service car
il était évident que le siège de Borth avait un potentiel nettement
plus important. En effet, les installations de triage se trouvaient sur
place et la proximité immédiate du Rhin facilitait les exportations,
c'est pourquoi l'extraction au siège de Wallach fut interrompue dès
1924 et la majorité de ses ouvriers furent transférés à Borth. Quelques
mineurs restèrent cependant à Wallach pour la maintenance des chantiers
et l'extraction de saumure en petite quantité. En 1936, Solvay fit
construire une tour en béton armé sur le puits N°1 de Borth, ce qui
augmenta considérablement sa capacité d'extraction. Dans le même temps,
l'usine est modernisée et un nouveau lavoir est mis en service peu
avant la guerre. Ces nouvelles installations augmentent la pureté du
sel produit et Borth devient connu dans toute l'Europe de l'ouest. Son
sel est utilisé pour la consommation domestique, pour l'industrie
chimique, pour le déneigement ainsi que dans les produits
pharmaceutiques et cosmétiques. Le sel est extrait par forage et
dynamitage dans des chambres d'une hauteur maximale de vingt mètres
avant d'être renvoyé en surface grâce à un skip ( une vidéo de la
remontée est visible ici ).
En 1960, Wallach ferme
définitivement ses portes et ses puits sont remblayés, il ne subsiste
de ce siège qu'une salle des machines. En 2002 est créée la
European Salt
Company GmbH & Co. KG, autrement appelée ESCO,
une
filiale commune de Solvay et de la Kaliwerk und Salz, une importante
société salifère basée à Hanovre. ESCO reprend le siège de Borth en
2004 et décide de moderniser une partie des installations. Le
chevalement portique du puits N°2 est démonté en 2006 et remplacé par
un chevalement moderne ayant une capacité de charge plus élevée. A
l'heure actuelle, Borth est devenu l'un des plus grand pourvoyeur
d'emplois de la région de Rheinberg, son réseau souterrain
est étendu sur 35 kilomètres et d'après les premières
prévisions, le gisement ne devrait pas être épuisé avant au moins
soixante ans. ESCO détient pour l'instant seize sites en Europe et
produit annuellement cinq millions de tonnes de sel pour 1.400 employés.
Reportage sur Salzbergwerk Borth, l'unique mine de sel
en activité dans la Ruhr.
Reportage sur zeche Wallach, un petit
siège qui a exploité la saumure jusqu'en 1960.
Copyright (c) / Photos by Nicolas
Elias, Xavier Fer & Laura Dambremont