Durant la seconde moitié du 19ème
siècle, l'annexion de la Lorraine et de l'Alsace au sein de l'empire
allemand est à l'origine de l'incroyable essor industriel de l'est de
la France. En effet, c'est suite au traité de Francfort du 10 mai 1871,
que sont annexés les territoires de la Moselle, du Bas-Rhin et du
Haut-Rhin, ces derniers étant rassemblés dans le Reichsland
Elsaß-Lothringen. Suite à cet évènement, de nombreux industriels
allemands vinrent s'installer dans les vallées de la Fensch, de l'Orne
et de la Moselle où étaient déjà présents les de Wendel. On retrouve
ainsi dans ces régions de grands noms liés à la sidérurgie comme les
Thyssen, les Röchling et plus particulièrement les frères Stumm,
dirigeants de la société Gebrüder
Stumm KG, qui possèdent une usine sidérurgique à
Neunkirchen dans la Sarre ainsi qu'une majorité des actions de
Dillinger Hütte et Halberger Hütte. Dans le but de sécuriser leur
approvisionnement en minerai de fer, les Stumm rachètent les mines
Charles-Ferdinand à Hettange-Grande ainsi que la mine Ida à
Sainte-Marie-aux-Chênes avant d'introduire une demande de terrain dans
la commune d'Uckingen (ancien nom d'Uckange), leur but étant d'établir
sur place une aciérie moderne pouvant rivaliser avec les installations
d'Hayange des de Wendel. La mise en place du premier haut fourneau
débute en décembre 1890, une construction qui sera suivie jusqu'en 1904
par cinq autres installations du même type, tous nommés de U I à U VI.
À l'aube de la première guerre mondiale, l'usine des frères Stumm
emploie déjà 500 personnes. Après le conflit, l'Alsace et la Lorraine
redeviennent françaises et l'usine sera placée sous séquestre avant
d'être absorbée par les Forges
et Aciéries du Nord et de Lorraine tout en gardant un lien
avec l'usine de Neunkirchen.
Durant les années vingt, les hauts
fourneaux 5 et 6 sont mis à l'arrêt et démantelés alors que les quatre
autres sont modernisés, un nouvel ensemble qui restera d'application
durant toute la fin de vie de l'usine. La qualité de la fonte exportée
à Neunkirchen évolue peu mais après le seconde guerre mondiale,
l'entreprise va évoluer et s'adapter à de nouveaux minerais avant
d'entamer une restructuration. En 1965, Uckange fusionne avec la
Société Anonyme des Hauts Fourneaux et Forges de Saulnes et Gorcy et
devient ainsi la Société
des Hauts Fourneaux Réunis de Saulnes et Uckange. Saulnes
cesse alors la majorité de ses divisions et se spécialise dans la
fabrication de la fonte électrique, autrement nommée "fonte Raty". Par
la suite, Uckange renomme ses hauts fourneaux de U1 à U4 et s'oriente
peu à peu vers la fonte de moulage avant d'abandonner totalement le
minerais de fer Lorrain pour des minerais importés à forte teneur en
hématite, l'usine devenant ainsi la seule unité de production de fonte
spéciale de France. La capacité de ses hauts fourneaux atteint dès lors
les cinq millions de tonnes de fonte par an pour un effectif de 1.150
personnes. Les hauts fourneaux 2 et 3 seront mis à l'arrêt entre 1965
et 1967 avant d'être suivis par le haut fourneau 4 qui sera quant à lui
entièrement reconstruit en 1976. Durant cette période, le dernier haut
fourneau actif, le N°1, se spécialise dans la fonte d'affinage qui est
désormais expédiée dans les aciéries de la région. Douze ans après son
extinction, le haut fourneau 4 est automatisé avant d'être remis en
service. Cependant, l'importation massive de métal étranger ainsi que
la fermeture progressive des installations sidérurgiques françaises
entraînent de graves difficultés à Uckange dont la fermeture survient
au milieu de l'année 1991. Son agglomération continue cependant de
fonctionner jusqu'en 1994 avant de fermer ses portes à son tour. Par la
suite, une grande partie de l'usine est démolie mais en 2001, la
Direction Régionale des Affaires Culturelles de Lorraine, l’Association
MECILOR, le CILAC et la municipalité d’Uckange parviennent à faire
inscrire le U4 ainsi que les magasins généraux, la chaufferie et la
salle des soufflantes sur la liste des monuments historiques lorrains.
La communauté d'agglomération du Val de Fensch devient propriétaire du
site en 2005 avant d'entreprendre une rénovation des installations dans
un but touristique. C'est finalement en octobre 2007 que le site est
ouvert au public, devenant par la même occasion un point de repère
incontournable dans toute la région.
Je remercie Xavier pour sa participation au reportage.